L’Arabie Saoudite en guerre contre les djihadistes

Le Roi Abdallah d’Arabie Saoudite a annoncé la mise en place d’un décret qui condamne tout saoudien ayant participé à un conflit à l’étranger.  “Le royaume des deux mosquées sacrées“ est-il en train de casser l’idée reçue d’une alliance secrète entre Arabie Saoudite et djihadisme ? 

Le gouvernement saoudien a décidé de prendre le problème à bras le corps à l’encontre des djihadistes. Le Roi Abdallah a lui-même fait savoir qu’il est prêt à punir toute personne s’engageant ou finançant le djihad en Syrie. Cette décision royale intervient alors même que se propagent des rumeurs d’attentat suicide contre les JO de Sotchi en Russie. Cette nouvelle, qui risque de surprendre en France, n’a pourtant rien de stupéfiant. Depuis plus d’un an, les autorités saoudiennes se montrent menaçantes à l’égard de sa population.

Le Roi Abdallah d’Arabie Saoudite (ici avec le secrétaire d’Etat américain John Kerry) a décidé de s'attaquer aux réseaux djihadistes dans son pays. ©DR

Le Roi Abdallah d’Arabie Saoudite (ici avec le secrétaire d’Etat américain John Kerry) a décidé de s’attaquer aux réseaux djihadistes dans son pays. ©DR

Il faut dire que depuis la défection du Qatar dans l’ingérence du conflit syrien, l’Arabie Saoudite est le pays le plus concerné dans la chute du président syrien. Le quotidien français le Figaro, en citant les sources d’une étude d’un service de renseignements, fait état d’environ 2000 ressortissants Saoudiens qui combattent dans les rangs djihadistes. La jeunesse saoudienne se trouve aujourd’hui coincée en étau comme en manque de repères. Certains profitent de la rente pétrolière, d’autres sont attirés par une occidentalisation de la société (pratiques, modes) et les derniers se tournent vers la religion et parfois l’Islam radical.

 L’Arabie Saoudite est-elle vraiment neutre ?

L’action du gouvernement waabite s’est inscrite dans une volonté de mettre fin à la rumeur qui annonçait que l’Arabie Saoudite finançait pleinement le Djihad en Syrie. Moi le premier, j’ai développé cette idée dans plusieurs de mes articles sur le conflit syrien. Or, qu’en est-il vraiment ? Comme les Etats-Unis au temps de la Guerre Froide, l’Arabie Saoudite a toujours financé les groupes djihadistes qui allaient dans le sens de leurs intérêts économiques et géopolitiques. Un des plus connus demeure Oussama Ben Laden notamment lors de la guerre d’Afghanistan (1979-1989). Le conflit syrien débuté en 2010 ne semble pas avoir changé la donne. Les différents groupes djihadistes opérant en Syrie ont reçu les dons économiques les plus importants de la part de… L’Arabie Saoudite. Dès lors, comment comprendre ce paradoxe ?

Le conflit syrien a énormément choqué la population musulmane de confession sunnite. L’Arabie Saoudite n’a pas échappé à la règle. Le pouvoir et les actions menées par la minorité alaouite (chiite) représentée par le clan el-Assad, l’aide du Hezbollah libanais et de l’Iran ennemi héréditaire, ont suscité l’action en Arabie Saoudite. La charité islamique s’est mise en place dans les mosquées du pays sous la demande de prédicateurs à destination d’ONG pour aider les réfugiés installés en Jordanie, au Liban et en Turquie. Or, ces transferts d’argent vont-ils réellement dans les poches d’ONG humanitaires ? Rien n’est moins sûr.

Autre cas de figure, les grands mécènes saoudiens qui participent ,à leur façon, à l’aide vers les réfugiés. Proches des familles royales, ils sont libres de financer ceux qu’ils veulent, djihadistes ou non. Leurs actions peuvent être en contradiction avec la politique officielle du Royaume. Le rôle joué par le chef des services de renseignement est tout aussi troublant. Le prince Bandar Bin Sultan est le directeur du General Intelligence Directorate. Proche des Etats-Unis, il a été pendant 20 ans l’ambassadeur saoudien dans ce pays, ce qui lui a valu le surnom de “Bandar Bush“. Bendar Bin Sultant s’était donné pour objectif de renverser le clan el-Assad par n’importe quel moyen. Il a financé et fait livrer des armes aux différents groupuscules djihadistes qui pullulent en Syrie. Il se dit même que  son manque d’efficacité pourrait lui coûter son poste…

Le Roi Abdallah a œuvré une fois de plus dans la volonté de stabiliser son pays en luttant contre le djihadisme et la radicalisation de jeunes Saoudiens. Or si les pratiques peuvent être limitées, il est beaucoup plus compliqué pour le vieux monarque (90 ans) de contrôler les flux financiers de son pays vers différentes organisations djihadistes. L’Arabie Saoudite reste donc, malgré la volonté de son souverain, bien active dans le financement du djihad en Syrie mais aussi ailleurs sur la planète (Caucase par exemple).

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